[Politique ]pour avoir quitté le Rdpc,il écope d'une lourde suspension à Maroua
Cette décision est fortement critiquée par la population. Elle accuse son auteur de mettre en péril le jeu démocratique. Alors que les populations sont focalisées sur la campagne électorale, le lamido de Maroua les a détournées en faisant parler de lui. Usant ou abusant de son pouvoir selon, sa majesté El Hadj Bakary Bouba a suspendu, à la surprise générale, l’un des notables de sa chefferie. C’est par un communiqué radio signé ce lundi, 27 janvier 2020, que le chef traditionnel du premier degré a rendu public la suspension de Hamandjam Toukour, notable depuis le 27 mai 2005. «Sa majesté El Hadj Bakary Bouba, lamido de Maroua, porte à la connaissance du public de Maroua et ses environs que Sieur Hamandjam Toukour a été suspendu de ses fonctions de notable (lawan keke) de la cour. Par conséquent, ne fait plus partie du corps des notables de la cour du lamidat de Maroua. A cet effet, tout acte posé par ses soins n’engage que lui et non comme un notable de la cour du lamidat de Maroua à compter de la date du présent communiqué. Le Lamido compte sur la bonne compréhension de tous», écrit-t-il.Dans le communiqué, le lamido n’a pas précisé le motif de la suspension de son collaborateur, mais a préféré convoquer ce dernier à la chefferie pour lui dire qu’il lui est reproché de ramer à contre-courant du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), le parti au pouvoir. «J’étais dans mon atelier de couture à l’avenue Kakataré lorsque subitement, quatre personnes envoyées par le lamido sont arrivées. Ces gens voulaient me prendre manu militari pour m’amener chez le lamido. Mais je me suis opposé. Je leur ai demandé le motif de l’urgence pour laquelle le lamido a besoin de moi, mais ils n’ont rien dit. Face à mon opposition catégorique, ils m’ont laissé et ils sont repartis. Quelques temps après, je suis rentré m’habiller convenablement et je me suis rendu au lamidat. A mon arrivée, le lamido s’est mis à me gronder. Puis il m’a dit que celui qui n’est pas au Rdpc, n’a pas de place dans sa chefferie. Désormais, tu n’es plus notable dans la cour de ma chefferie. Je lui ai répondu avec respect, j’ai compris, majesté. Il y avait dans son salon une délégation du Rdpc conduite par le ministre Yaouba Abdoulaye. Le lamido lui a dit : Excellence monsieur le ministre, désormais celui-ci n’est plus des nôtres», explique Hamandjam Toukour.Le président des Ateliers de couture et broderie de la ville de Maroua dit être surpris par le motif sur lequel s’appuie le lamido pour justifier sa suspension. «Quand il m’a nommé notable, j’étais militant du Rdpc. J’étais même président de la sous-section Rdpc de Founangué Centre. Mais j’ai démissionné de ce parti le 12 décembre 2019. J’ai rendu compte au lamido et je lui ai fait part de mon intention d’adhérer au Fsnc, le parti d’Issa Tchiroma Bakary. Il m’a dit que je suis libre d’être au Rdpc ou pas. Quand j’ai été investi par le Fsnc pour les élections municipales à la commune de Maroua 2e et à la suite de la publication des listes par Elecam, je suis allé l’informer. Je suis surpris qu’aujourd’hui, il sort le prétexte de mon adhésion au Fsnc pour justifier sa décision. Pourquoi ne l’avait-il pas fait depuis décembre 2019 où il a été informé que j’ai démissionné du Rdpc ?», déclare le désormais ex notable de la cour. L’homme de 60 ans et père de 17 enfants, aux côtés du lamido depuis 15 ans, croit fermement que l’autorité traditionnelle a agi sous l’influence du ministre Yaouba Abdoulaye. «Les enfants m’ont rapporté que Fada (l’homme de main du ministre Yaouba Abdoulaye, Ndrl) disait à qui voulait l’entendre qu’il allait demander au lamido de me suspendre de mes fonctions de notable pour avoir démissionné du Rdpc», indique-t-il. Joint au téléphone par le reporter de votre journal, le lamido de Maroua n’a pas voulu s’exprimer sur sa décision. «Il s’agit d’une affaire entre le lamido et son notable. C’est une affaire de chefferie. Je ne sais pas pourquoi ça intéresse L’œil du Sahel pour en parler», a répondu El Hadj Bakary Bouba. Dans la ville de Maroua, la décision du lamido est fortement critiquée. Non parce que le notable suspendu est connu comme un homme intègre qui incarne des bonnes valeurs, mais surtout parce que l’autorité traditionnelle met en péril le jeu démocratique. Pour certains, la stratégie du lamido vise à fragiliser le Fsnc dont la percée dans la ville de Maroua l’inquiète. Même au sein de sa propre formation politique, nombreux sont ceux qui trouvent.