Compte unique du trésor : aux sources d'une réforme qui piétine

Malgré l’alignement aux standards internationaux, quelques insuffisances sont relevées dans l’implémentation du CUT. Les habitudes ont certainement la peau dure. Même en matière de finances publiques. Ceci peut se vérifier avec l’implémentation du Compte unique du trésor (CUT) entré en vigueur en 2007 pour répondre au souci de transparence dans la gestion des comptes publics de l’Etat. Malgré l’avènement de ce CUT, des agents publics et de nombreuses institutions et entreprises publiques tardent encore à s’aligner à la nouvelle donne. Pourtant, les époques ont changé. A l’occasion d’un récent séminaire sur les réformes engagées au ministère des Finances, Pierre Mba de la Direction générale du Trésor au Minfi est revenu sur l’architecture du Compte unique du Trésor et ses mécanismes de fonctionnement. Après avoir expliqué que le CUT est un principe universel dans la gestion des finances publiques, qui découle du principe de l’universalité budgétaire, l’expert s’est appesanti sur les deux périodes qui ont marqué l’évolution de ce secteur. De Pierre Mba, on retient que la première période est celle d’avant 2007 avec l’ancien système marqué par l’Ordonnance du 07 février 1962 portant régime financier de la République fédérale du Cameroun. On note ici une multiplicité de comptes des entités publiques ouverts dans le système bancaire ; plus de 1000 comptes ouverts. Une panoplie de comptables publics titulaires de comptes ouverts dans le système bancaire. Notamment 03 catégories : Les comptables des établissements publics (Comptes dans les banques commerciales) ; plus de 400 comptes des ressources publiques recensés à fin 2007, entrainant des dépôts oisifs évalués à près de 200 milliards Fcfa alimentés par les subventions versées. Les comptes des Collectivités territoriales décentralisées (comptes dans les banques commerciales ; Près de 500 comptes recensés alimentés par les subventions versées par l’Etat. Et les Comptables publics de l’Etat (comptes ouverts à la Beac) ; 37 comptes ouverts dans les agences Beac situées au niveau des chefs lieux des régions. Selon l’expert Minfi, les conséquences ont été dévastatrices pour l’argent public de l’Etat. De l’ordre de l’accumulation des dépôts oisifs au détriment du Trésor, à l’éviction des liquidités publiques dans le réseau Trésor au profit des banques commerciales. En passant par l’existence des zones dites riches (triangle d’or « Douala, Buea, Nkongsamba » opposée aux zones pauvres (le reste des circonscriptions financière). Aussi, peut-on relever l’accumulation des arriérés et dégradation de la signature de l’Etat. Agence centrale Il aura donc fallu réformer le Trésor pour éviter de telles tares dans le système. Vient donc la loi du 26 décembre 2007 portant Régime financier de l’Etat :On assiste au basculement du Trésor public dans la réforme des systèmes de paiement en zone Cemac. Entrainant la création du CUT logé à l’Agence comptable centrale du trésor (Acct). « Désormais, c’est un seul intervenant, un seul compte de règlement, fermeture des comptes bancaires des divers Trésoriers payeurs généraux à la Beac. Le Compte unique du trésor géré par l’Acct devient le seul interlocuteur de l’ensemble du réseau comptable de l’État vis-à-vis du système bancaire auquel il est interconnecté par le biais des plateformesSystac (Système de télé-compensation en Afrique centrale) et Sygma (Système de paiement de gros montants automatisés)», précise Pierre Mba. Bien plus, ajoute-t-il, comme effets induits de la réforme, il y ala centralisation de toute la trésorerie de l’Etat pour une meilleure lisibilité des avoirs en temps réels tous les soirs à 17h, production de la situation journalière de trésorerie ; l’abolition du clivage « zone pauvre » « zone riche » ; la création d’une structure au sein du Minfi dédiée à la planification et à la gestion de la trésorerie des entités publiques: la Direction de la Trésorerie. Avec pour rôle d’assurer une meilleure programmation des dépenses de l’Etat sur l’ensemble du territoire national ; le renforcement de la crédibilité de la signature de l’Etat qui intervient désormais sur le marché ; l’homogénéisation des délais de paiement au niveau national autour de 3 mois. Elargissement du périmètre Une réforme, peut-on s’en douter, qui n’est pas du goût de tout le monde. Conséquence, de nombreuses insuffisances relevées. Aux rangs desquelles le champ d’intervention encore partiel du CUT, la non intégration des fonds d’autres entités publiques (374 Ctd) ,80 Etablissements publics administratifs. Mais aussi, un volume important de dépôts publics encore domiciliés dans le système bancaire alors que la mobilisation desdits dépôts aurait permis de résorber la préoccupation relative aux impayés recensés en fin d’exercice, explique l’expert. Le recours à l’emprunt alors qu’il existe des marges de trésorerie disponibles ; la gestion passive de la trésorerie de l’Etat et une relative extension des délais de paiement sont d’autres griefs soulevés. Au vue des insuffisances sus relevées, une nécessité de reformer à nouveau le système s’impose. Et selon Pierre Mba, deux aspects sont à considérer : L’alignement des pratiques nationales aux standards internationaux et le respect des critères inscrits dans le cadre du Programme économique et financier conclu avec le Fonds monétaire international. S’agissant des réformes en cours, on peut relever l’alignement de l’architecture du CUT aux bonnes pratiques avec pour objectif, l’amélioration la gestion de la trésorerie des entités publiques ; l’élargissement du périmètre du CUT à toutes les entités publiques afin de fermer des comptes ouverts dans les banques commerciales et reversement du solde dans le CUT ; les recettes encaissées doivent être rapidement centralisées sur le compte unique ouvert à la banque centrale, et ce, le même jour ; La conservation des liquidités « Oisives » doit être évitée pour optimiser l’utilisation des liquidités, investir le surplus disponible.


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