Par Grégoire DJARMAILA La vie est-elle devenue un bazar permanent dans nos cités ? Au regard de l’environnement assommant dans lequel sont plongés au quotidien les habitants de nos villes, on peut être tenté de répondre par l’affirmative. Au Cameroun et ailleurs dans le monde, la grande concentration des populations dans les mégapoles et les autres villes intermédiaires est l'un des faits les plus marquants de notre époque. La quête d’une vie et même d’une survie meilleure charrie avec elle les incommodités de toutes sortes. Les nuisances sonores se présentent aujourd’hui comme la grande préoccupation de la vie en ville. Une grande partie de la population urbaine y est confrontée, et en particulier les riverains de routes, de voies ferrées, d'aéroports, de ports et de zones industrielles. Les voisins de discothèques, des zones marchandes, de chantiers, de salles de concert etc. le sont aussi. Avec les progrès économiques et l’évolution technique et technologique, la liste des fauteurs de troubles de l’environnement s’enrichit d’année après année. Chez soi ou dans les lieux publics, chacun vit désormais, contre son gré, dans l’enfer du bruit. Nos domiciles, jadis des refuges pour nous permettre de jouir d’un repos douillet après une journée éreintante et stressante au boulot ne le sont plus. Partout, en tout lieu et à tout moment, le bruit pollue nos vies. Les grandes villes sont quasiment devenues de véritables caisses de résonance. Là-bas, les pollutions sonores et olfactives confinent même à la banalité. Les principales artères sont transformées en gigantesques carnavals sonores à ciel ouvert. On est en permanence assommé par les campagnes promotionnelles à la devanture des grands magasins, le concert des klaxons, la ronde des camionnettes publicitaires, les cris des vendeurs ambulants, etc. Sans oublier les motos-taxis qui sont elles aussi entrées dans la danse. Dans les quartiers, les veillées funèbres ont pris une nouvelle dimension. Avec ou sans autorisation des autorités locales, les « veilleurs » s’installent littéralement sur la principale voie d’accès du quartier, obligeant les habitants à jouer au système D pour sortir ou rentrer chez eux. Toute la nuit et jusqu’aux premières heures de la matinée, des hauts parleurs débitent des décibels de musique religieuse relayée par des rythmes mondains à faire hurler un sourd. Non loin de là, ce sont de nombreux bistrots et bars dont les « DJ » se livrent à une concurrence…sonore. Que dire de ces prédicateurs ambulants convaincus d’avoir découvert le nouveau messie, qui investissent tous les carrefours et autres places publiques de nos cités ? Ce sont les « nouvelles recrues » des églises dites nouvelles ou du réveil. Ces « nouveaux temples de Dieu » foisonnent dans tous les coins et recoins de nos cités. Au-delà du vacarme provoqué par cette évangélisation « forcée », il y a aussi et surtout le canal de transmission de la « sainte parole » qui cause une gêne excessive pour le voisinage du fait des haut-parleurs installés à dessein à l’extérieur des lieux de « culte » et qui envoient au loin la tonitruante voix du « pasto » et de ses interprètes. Depuis l’adoption et la promulgation de la loi du 19 décembre 1990, portant liberté d’association au Cameroun, la société est envahie par une inflation spirituelle. A travers le pays, on assiste à la prolifération d'églises réveillées. Vues par les fidèles comme un moyen de se « rapprocher du Seigneur », ces nouvelles associations religieuses sont à l'origine de multiples tourments chez les populations riveraines. En dehors des diverses dérives souvent observées au sein de ces chapelles bruyantes, les nuisances sonores qu’elles produisent constituent l’enfer pour les populations environnantes.
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