La vie presque normale au centre-ville contraste avec zones périphériques où l’on note de moins en moins des déplacements en direction. L’entrée de la ville de Buea le 15 novembre porte encore les stigmates de la guerre. Sur les murs de certains immeubles en construction ainsi que des maisons achevées, les impacts de balles sont visibles. Au lieudit « mile 14 », nombre de domiciles sont abandonnés. Portes et fenêtres sont closes. Idem pour des centres commerciaux, notamment un hôtel en carreaux de couleur rouge, appartenant à un homme d’affaires du coin. Lequel a décidé il ya quelques années de quitter l’étranger pour venir s’installer et investir dans sa ville natale. Une décision qu’il doit certainement regretter. A 500 mètres environ de là, les agents des forces de défense et de sécurité surveillent les entrées et sorties des véhicules. Cagoulés, nombre d’entre eux sont disséminés à chaque côté de la route, derrière des sacs de sables superposés. Des trous visibles sur ces sacs renseignent sur l’intensité des échanges de tirs entre l’armée régulière et des groupes armés sécessionnistes. En bordure de route, d’autres agents dirigent la circulation. Ici, les passagers descendent des véhicules pour se soumettre aux contrôles avant de poursuivre leur périple. Soulignons que le segment de l’axe routier où se font les contrôles est enclavé. Il n’est donc pas rare de voir des passagers se retrousser les manches pour pousser leurs véhicules embourbés. Une situation qui ralentit la circulation, provoquant des arrêts. Des arrêts suspects que les forces de sécurité ne voient pas toujours d’un bon œil. « Qui vous a demandé de descendre ? Y a-t-il un problème ?», interroge un agent, le regard méfiant. « Le véhicule s’est arrêté et nous étions obligés de descendre pour alléger le poids de l’engin », répond un passager. Après quelques minutes, le voyage reprend. Une fois au centre-ville de Buea, le paysage tranche avec celui des zones périphériques, à l’instar de l’entrée depuis Mutengene. L’on aperçoit plus de monde dans les rues. Les uns et les autres vaquent paisiblement à leurs activités. Au quartier « Molyko » c’est quasiment la même ambiance paisible. La cour du Lycée bilingue, en pleine récréation, donne à voir nombre d’élèves vêtus de leurs uniformes de couleur bleue qui se divertissent en attendant la reprise des cours. Du coté de l’Université de Buea, l’on aperçoit également des étudiants qui discutent joyeusement à l’entrée. Plus l’on avance, l’on réalise que certains localités se portent moins bien. La cour du collège confessionnel « Les baptistes » par exemple est déserte. Les salles de classes sont fermées. « Les élèves ne vont plus à l’école. Ils craignent pour leur sécurité », fait savoir un riverain. Curieusement, les espaces commerciaux sont ouverts. Boulangeries, blanchisseries et banques continuent d’accueillir des clients. Le même scénario s’observe au marché Non loin dudit marché, se développe une poubelle. Cet état d’insalubrité n’est pas que l’apanage du seul marché de Molyko. Dans la ville, l’insalubrité règne en maître. Les espaces verts non entretenus et les hautes herbes envahissent les alentours des bâtiments abritant les services publics et administratifs. « Très souvent à cette période d’avant noël, les propriétaires des immeubles mettent de nouvelles couches de peinture sur les murs pour les rendre plus attrayants. Regardez ce qu’est devenue l’esplanade du stade Omnisport de Molyko, ou même l’Université catholique. On ne pouvait laisser pousser une seule herbe là. Aujourd’hui avec la crise, qui peut entretenir la ville ? » Le cœur meurtri, un journaliste originaire de la ville de Buea partage son amertume. D’après ce dernier, la présence humaine actuelle dans la ville de Buea et le déroulement des activités quotidiennes contraste nettement avec la réalité observée il y a trois ans de cela, avant le début de la crise en 2016. « Les habitants sortent le matin pour vaquer à leurs occupations juste parce qu’ils ne peuvent pas se terrer indéfiniment dans leurs maisons. Mais, il arrive parfois qu’a’près une période de calme apparent, l’on entend des coups de feu. A ce moment-là, chacun prend ses jambes au cou et dessine le vide », décrit l’homme de média. Ce dernier indique également que les populations reçoivent au quotidien la visite, des groupes armés non étatiques. Difficilement identifiables à la vue, ces derniers se fondent dans la masse pour prendre connaissance des dernières actualités de la ville. Les habitants de la ville Buea côtoient la peur au quotidien. Ainsi, ceux qui ont décidé d’y vivre en dépit des attaques sporadiques perpétrées par les « Ambazoniens », témoignent ainsi de leur capacité de résilience face à cette instabilité.
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