En déclarant ces régions zones économiquement sinistrées, qu’est-ce que cela va changer ? Selon un décret rendu public le 2 septembre 2019 par le Premier ministre camerounais, Joseph Dion Ngute, les régions de l’Ex-trême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont officiellement déclarées « zones économiquement sinistrées ». Ce statut, selon les textes en vigueur dans le pays, permet à l’État d’offrir des incitations diverses aux entreprises désireuses de s’installer dans ces zones touchées par l’insécurité. Ces incitations prennent la forme d’exonération d’impôts pendant une période de 3 ans. Pour rappel, depuis 2013, la région de l’Extrême-Nord lu Cameroun est victime les attaques des membres le la secte islamiste nigé-iane Boko Haram, dont les îcursions meurtrières ont ratiquement lessivé le aigre tissu économique ? cette partie du Cameroun. Depuis fin 2016, les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du pays se sont, quant à elles embrasées, suite à des revendications corporatistes des avocats et enseignants anglophones. Ces mouvements d’humeur ont ensuite dégénéré en revendications indépendantistes à partir de 2017, transformant ces deux régions anglophones du Cameroun en théâtre d’affrontements entre l’armée régulière et les militants séparatistes. On comptabilise déjà plus de 2000 morts. Quelques questions se posent tout même après la prise d’une telle décision. Que vise le gouvernement ? Non pas qu’il n’est pas évident que ces zones sont économiquement sinistrées, mais il faut néanmoins comprendre que offrir des facilités à ceux qui veulent investir dans ces zones ne suffira pas à encourager de potentiels investisseurs, ce, pour quelques raisons. L’on sait par exemple qu’à cause des affrontements et du non-droit qui régnent dans ces régions en crise, de nombreux projets même gouvernementaux ont été. abandonnés par les prestataires. L’on se rappelle d’ailleurs qu’il y a quelques mois, le gouvernement a résilié les contrats de nombreux prestataires qui avaient abandonnédes chantiers dans ces zones. Qui peut prendre le risque de venir réaliser des projets dans un territoire en guerre ? La Cdc, malgré la perfusion financière de l’Etat, ne connaît-elle pas de sérieux soucis à cause des attaques contre ses installations ? Ses travailleurs n’ont-ils pas été agressés par des séparatistes ?En août 2018 par exemple, des hommes armés ont attaqué des employés d’une plantation de la Cdc à Tiko, dans le sud-ouest du Cameroun, faisant de nombreux blessés. Il s’agit de la deuxième atta en l’espace d’un me- visant cette plantation. Certains ont été amputés. Plus de 11 000 emplois ont déjà été supprimés, la moitié des effectifs. 3000 hectares de plantations ont été abandonnés. Le chiffre d’affaires est passé de 60 à 2,5 milliards. Que dire alors de la Pamol ? Qui est donc celui qui est prêt à s’engager dans un climat aussi délétère ? La guerre a toujours fait fuir les investisseurs et seuls ceux qui sont spécialisés dans l’industrie de la guerre tels que les vendeurs d’armes trouvent leur compte. Si déjà la crème des autorités de ces régions est protégée par les forces de défense et de sécurité, l’Etat peut-il accorder les mêmes facilités sécuritaires aux investisseurs qui voudraient s’y aventurer ? Et que fera-t-on des employés desdits investisseurs ? Il n’y a que dans un climat de paix que l’on peut investir. La solution est ailleurs et l’Etat le sait. Si aucune solution politique à même de résoudre la crise n’est trouvée, le sinistre économique va davantage être prononcé dans ces régions, ce que l’on ne souhaite pas. Cette semaine, nous avons posé les questions suivantes à nos experts : Pourquoi c’est seulement maintenant que l’on déclare ces zones économiquement sinistrées ? Quelle pourrait être ici la stratégie du gouvernement? Vu comment les entreprises telles que la Cdc ou la Pamol se sont effondrées dans cette atmosphère de guerre, qui pourra prendre d’aller investir dans des endroits pareils ? Est-ce que déclarer ces zones économiquement sinistrées est ici une solution globale au problème qui se pose ?
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