La détention de Kamto et l'instrumentalisation du tribalisme au Cameroun en débat en France
Nos confrères de DIAF TV ont consacré une émission aux développements troubles et troublants de la crise postélectorale au Cameroun dont la dernière matérialisation est l'arrestation et la détention depuis plus d'un mois de Maurice Kamto et des centaines de militants et alliés de son parti, le MRC, principal challenger de Pul Biya à la présidentielle du 7 octobre 2018. Une émission en deux parties, dont la première a traité des manifestations du 26 janvier 2019 ayant abouti à la mise à sac de certaines missions diplomatiques en Europe, et dont la deuxième, s'est penchée sur « l'instrumentalisation du tribalisme au Cameroun et la détention du leader de politique camerounais ».Où l'on se rend compte que la notion détestable du tribalisme sert désormais de prétexte au pouvoir pour diaboliser ses adversaires, alors qu'il est justement lui-même passé maître dans l'art de cette pratique à des fins politiciennes. Au passage, les invités éclairent la lanterne du public sur la pertinence de la démarche contestataire entreprise par Maurice Kamto, et rendent aisée la compréhension de la posture campée par l'éminent homme de droit, aujourd'hui homme politique, lorsqu'il affirmait à l'issue d'une précédente élection présidentielle, que la décision de la Cour Suprême agissant comme Conseil Constitutionnel ne pouvait donner lieu à contestation. Car il faut le dire, cette position du Pr. Kamto hante les débats au Cameroun où les stratèges en communication du parti (désormais illégalement et illégitimement) au pouvoir font croire que Maurice Kamto avait décrété les décisions du Conseil Constitutionnel absolument inattaquables, et qu'il ne saurait en ce qui le concerne chercher à passer lui-même outre cette doctrine qu'il avait édictée, faisant semblant d'oublier qu'à l'époque Kamto parlait du caractère inattaquable d'une décision qui n'avait pas été précédée par une contestation d'une des parties. Bien plus, ceux qui animent ce débat en y mettant une bonne dose de mauvaise foi feignent d'ignorer que dès l'entame du contentieux électoral Maurice Kamto avait introduit une requête en suspicion légitime pour la récusation des membres du Conseil Constitutionnel dont il est prouvé qu'au moins 9 des 10 membres sont des obligés du candidat président sortant. Ce qui fait que du même coup, les décisions de ce Conseil resté inchangé dans sa nomenclature nonobstant ses suspicions, ne pouvaient jouir d'une légitimité quelconque à ses yeux. Ce à quoi s'ajoute le débat de la nuance qu'il y a à faire entre un Conseil Constitutionnel qui se pose sémantiquement comme un organe d'avis, et une Cour Constitutionnelle dont la nature sémiologique induit ipso facto une idée d'institution judiciaire.