De nombreux observateurs estiment aujourd’hui que l élargissement définitif des grands malades de l opération Epervier pourrait contribuer à décrisper le climat politique actuel, même si les évacuations sanitaires accordées à quelques-uns d entre eux s assimilent déjà à une sorte de grâce présidentielle. Le débat sur les évacuations sanitaires des prisonniers dits de luxe ne cesse aujourd’hui de faire jaser dans certaines chaumières et salons huppés de la République. Si pour certains, cette activité est tributaire d’un cadre normatif bien défini, répondant aux exigences de respect de quelques critères objectifs, pour d’autres, c’est une prérogative qui relève du pouvoir « discrétionnaire » du chef de l’Etat. D’où ces voix qui ne cessent de s’élever au sein de l’opinion ces derniers jours pour demander au président de la République, d’autoriser l’évacuation sanitaire à l’étranger de certains malades de l’opération Epervier. Le cas le plus récurrent est celui de Gervais Mendo Ze, l’ancien directeur général de la radiotélévision publique (Crtv), qu’on dit très malade et interné au pavillon Vip de l’Hôpital central de Yaoundé depuis plus d’un an. « Le cas du Pr. Gervais Mendo Ze est donc celui qui nous préoccupe en ce moment. Il est condamné à diverses années de prison pour des fautes bien lourdes. Nul n’est au-dessus de la loi. Il faut bien que la justice s’applique à ceux qui ont poussé le pays au bord du précipice. Cependant, Excellence, nous voyons un homme mourir. Nous voyons la vie le lâcher. Nous voyons sa dignité tomber. Nous vivons l’effondrement d’un semblable. En effet, nous sommes bien nombreux dont les places sont en prison. Mais par pure miséricorde divine, nous n ‘y sommes pas en ce moment où je vous écris. (… ) Conscients de nos propres insuffisances, nous venons plutôt vous prier de lui accorder une fin de vie digne. Permettez qu’il bénéficie d’une évacuation sanitaire hors du Cameroun. Daignez permettre qu’il retrouve au moins une bonne santé avant de jauger de l’avenir que vous pourriez donner à sort dossier, » s’inquiétait, dans une correspondance adressée au chef de l’Etat et abondamment relayée sur les réseaux sociaux, Mgr Jean de Dieu Emini, ancien vicaire général du diocèse de Mbalmayo et actuel curé de la paroisse de Ndelle à Ayos. Mais bien avant le cas Gervais Mendo Ze, inter- ‘ pellé le 12 novembre 2014 et condamné le 19 mars 2019 à 20 ans de prison pour détournements des fonds publics, c’était au tour d’un autre ancien patron de l’audiovisuel public, Amadou Va-moulké, arrêté en juillet 2016 et depuis écroué à la prison centrale de Yaoundé pour des faits présumés de détournements de deniers publics, de réclamer aux autorités, une évacuation sanitaire en Occident afin d’y suivre des soins appropriés. Par la suite, ce sera le tour des Abah Abah, Olanguena Awono, Marafa Hamidou Yaya, Iya Mohamed, et bien d autres de solliciter une évacuation sanitaire à l’étranger. Alors question : doit-on finalement accorder les évacuations sanitaires à tous les prisonniers de « luxe » qui en réclament lorsqu’on sait que certains, une fois dehors, ne songent jamais à retourner au pays lorsque leur situation est rétablie ? Le subodorer un seul instant reviendrait à forcer la main au chef-de l’Etat, tant on sait que certains de ces individus sont dans les geôles pour leur implication, ou non dans la mauvaise gestion des fonds publics. Mais seulement, de nombreux observateurs pensent que l’élargissement de certains malades pourrait contribuer à calmer les tensions et décrisper le climat politique actuel, surtout que ceux-ci font parfois l’unanimité dans leurs régions d’origine. Mais en fin de compte, il ne serait pas superfétatoire de rappeler que les évacuations sanitaires coûtent énormément chères aux pouvoirs publics, surtout qu’il revient dans un premier temps, à l’institution qui détient les prisonniers de leur fournir des soins médicaux appropriés. Nos sources parlent de 45 à 50 millions Fcfa à débourser dans le cas des malades graves, sollicitant une évacuation sanitaire en France, avec un avion médicalisé. Dans le cas où l’on n’a pas prévu un avion médicalisé, le malade doit occuper les six sièges arrière de l’avion, pour des cas graves. Cela peut coûter environ 15 millions Fcfa. Pour ce qui est des patients moins graves qui occupent les 2 sièges arrière, le voyage coûte 5 et 6 millions Fcfa. A ces frais, une somme d’environ 40 millions Fcfa doit être versée au consulat de France. Cet argent est considéré comme le visa. Enfin, une journée dans un hôpital en France tourne autour d’un million Fcfa. Ceci expliquerait-t-il, la réticence des pouvoirs publics en matière d’autorisation des évacuations sanitaires ? That’s the question !
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