Ils sont de plus en plus nombreux les hommes et femmes qui souffrent de démence et qui écument les rues de la cité capitale. Non loin de la recette municipale, une femme la quarantaine entamée avance pas à pas, ses pieds et sa robe Kaba recouverts de poussière, sa greffe ébouriffée montre à suffisance qu’elle a des soucis de santé. Subitement elle s’arrête devant les cassiers de bière empilés et commence à vider les fonds des bouteilles. Un exercice que se prête depuis le lever du jour un jeune homme qui porte une greffe sur la tête et des vêtements en lambeaux esquissant quelques pas de danse au rythme de la musique que distille une buvette qui se trouve à proximité. Non loin du ministère de soya un milieu très fréquenté par les adeptes de la viande braisée, c’est tantine Rosa comme elle se fait affectueusement appeler, semble avoir sa spécialité dans l’art culinaire. Elle apprête en longueur de journée son repas dans une boîte de lait servant de marmite posée sur trois petites pierres et elle attise de temps en temps le feu sous le regard indifférent des passants. Sur l’axe carrefour face à face – carrefour terrestra on retrouve trois malades mentaux (deux hommes et une femme), partant du carrefour de la communauté urbaine pour l’aéroport de Bertoua en traversant les quartiers Yadémé, Tidamba, Mère Poule, Enia, Toungou on dénombre une demi-douzaine des malades. Entre le carrefour de la poste et le stade départemental, il y a trois autres citoyens camerounais qui souffrent de démence. Ceux qui écument les différents marchés et quartiers de la ville n’ont pas pu être recensés. Ce tableau montre à quel point les malades mentaux déambulent en grand nombre dans la ville de Bertoua : « Ils sont partout, chaque rue ici est ornée par au moins deux malades mentaux et leur nombre croit au quotidien » affirme Njiké Elvis, commerçant au marché central de Bertoua. Et à Sylvie Mendouga d’émettre des réserves sur la sécurité des populations : « Les agressions des malades ne sont pas prévisibles, et le fait qu’ils côtoient les populations constitue un danger permanent » s’inquiète la jeune enseignante de philosophie. « Ils arrachent parfois nos repas ici, nous menacent même quand ils exigent de l’argent » témoignent Gédéon Tamfo, un jeune mécanicien. La ville de Bertoua en particulier et la région de l’Est en général ne dispose pas d’une structure spécialisée dans la prise en charge de ces malades. Mais l’hôpital régional de Bertoua assure comme il peut et à la limite de ses possibilités la prise en charge des malades mentaux, mais la difficulté est que ces personnes arrivent à l’hôpital lorsque la situation est suffisamment dégradée : « Les familles nous apportent les malades après avoir fait le tour des guérisseurs, charlatans, marabouts et les églises dites de réveil. Et c’est lorsque la situation est suffisamment compliquée que les familles se dirigent vers l’hôpital et là le malade est dans un état suffisamment dégradé » laisse entendre Dr Alain Mougnol, un psychiatre. Le docteur conclut : « Les malades sont très souvent abandonnés à l’hôpital par leurs parents, n’ayant ni la possibilité ni les moyens de les maintenir dans les hôpitaux ils s’enfuient et la conséquence est qu’on les retrouve déambulant un peu partout dans les rues de la ville » . La situation doit interpeller la communauté urbaine de Bertoua qui doit se concerter avec les autres municipalités (communes de Bertoua 1er et Bertoua 2eme) ainsi que toute les autres sectorielles afin d’envisager les voies et moyens pour juguler le phénomène de la divagation des malades mentaux dans la ville.
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