Campost/beac : les dessous de la discorde

La Banque centrale a rejeté la demande d’autorisation d’un système de règlement et de compensation au Cameroun, alors qu’elle a été régulièrement consultée. Quand vérités et contrevérités s’affrontent. Le Cameroun devra attendre encore, avant de pouvoir utiliser son Switch national destiné aux paiements électroniques. Lancée le 31 mars dernier, cette infrastructure d’agrégation électronique, logée au Data Center de la Campost à Yaoundé a buté contre le mur de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (Beac). Le dossier de demande d’autorisation introduit par ta partie camerounaise auprès de la Banque centrale, a été rejeté « air irrégulier en la forme ». Dans une correspondance adressée le 15 avril dernier au directeur général de la Cameroon Postal Services (Campost), le gouverneur de la Banque explique que l’intégralité du dossier de demande a été « rédigée en langue anglaise, et non pas en langue française qui est la langue de travail de la Beac et de la Cobac». Alors que dans la pratique, le Cameroun est un pays bilingue qui a pour langues officielles le français et l’anglais. Contrevérités Dans le fond, ce n’est pas tant la langue qui causerait problème à l’institution bancaire. La Beac fait en effet un reproche plus technique mais de manière voilée, à la Campost. La Banque centrale estime que « le lancement effectué le 31 mars 2020 est intervenu sans que la Campost ait au préalable demandé et obtenu toutes les autorisations nécessaires prévues par les textes de le Cemac en vigueur». Le problème ? C’est que, la Beac parie expressément du « lancement officiel de la plateforme du Switch du système de compensation et de règlement des transactions monétiques du Cameroun ». L’institution gouvernée par le Tchadien Abbas Mahamat Tolli serait pourtant loin de la vérité, dit-on à la Campost. « Contrairement à la Beac qui parle d’un Switch du système de compensation et de règlement des transactions monétiques, le Cameroun a plutôt procédé au lancement de sa plateforme nationale d’agrégation des communications électroniques qui, elle, est une infrastructure de commutation de paiements électroniques », martèle un employé ayant travaillé sur le dossier. D’ailleurs précise ce dernier, « Il faut noter que le lancement ou encore inauguration de cette plateforme concernait uniquement la composante agrégation USSD du réseau national des communications électroniques ». La Beac régulièrement consultée Dans les couloirs du ministère des postes et Télécommunications, de nombreuses voix fustigent également l’attitude de la Beac qui dit-on, donne l’impression d’avoir été mise devant les faits accomplis. « Dans sa démarche, le Cameroun s’est toujours référé à la réglementation en vigueur à ia Cemac. La Beac a été consultée durant tout le processus de mise en place de ce Switch national destiné aux paiements électroniques », révèle encore un fonctionnaire dudit ministère. Ainsi donc, l’on apprend que dans le cadre de la stratégie du gouvernement à assainir le marché des communications, le Minpostel a engagé il y’a deux ans une série de concertations avec les principaux acteurs que sont notamment les opérateurs à concessions et la Beac « pour la mise en place d’un système unifié et interopérable pour tous les utilisateurs de ia ressource USSD du réseau national des communications électroniques pour la fourniture des services à valeurs ajoutées y compris les services de paiement mobile ». Les premières consultations ont débouché non seulement sur une décision rendue le 26 novembre 2019, déterminant les conditions et les règles d’exploitation de la ressource USSD pour l’accès à la plateforme nationale d’agrégation des communications électroniques. Mais également sur un communiqué de l’Agence de Régulation des Télécommunications (ART), invitant les opérateurs des réseaux et les fournisseurs de services de communications électroniques à s’y interconnecter, dans un délai de 30 jours, pour la fourniture de leurs services financiers mobiles. «LeMinpostel a alors engagé une série des réunions avec toutes les parties prenantes : Beac, ministère des Finances, opérateurs de réseaux mobiles (MTN, Orange, Nexttel et Camtel), opérateurs de systèmes des paiements (Express Union, SGB, Ecobank, UBA) et le ministère de ia Justice », apprend-on encore. Le gouvernement de la Banque centrale saisi Cependant, ayant été saisie par certains opérateurs mécontents, la Beac va inviter la ministre camerounaise des Postes et Télécommunications à prendre part une la réunion relative à la mise en oeuvre du règlement du 21 décembre 2018, relatif aux services de paiement dans la Cemac, le 15 décembre 2019. « Etaient présent à cette réunion, des représentants de la Cobac et du ministère des Finances », glisse une source au Minpostel. Et d’ajouter que les mêmes parties ont été convoquées à une deuxième réunion à la Beac, le 14 janvier 2020. « Preuve que la Banque centrale a été régulièrement consultée par la partie camerounaise, le vice-gouverneur de l’institution, dans une correspondance datée du 24 janvier 2020, en réaction à une correspondance du Minpostel relative à une demande d’accompagnement de la Cam-post par la Beac, va demander à la Campost de formaliser cette initiative en déposant auprès des services du gouverneur le dossier de demande d’un système de règlement et de compensation », explique encore une source proche du dossier. D’où la lettre signée le 26 février 2020 par la Minpostel, transmettant à la Campost la correspondance du vice-gouverneur de la Beac lui demandant de formaliser la demande d’autorisation et de déposer un dossier conforme dans les services du gouverneur dans les meilleurs délais. Chose faite le 30 mars 2020, C’est ainsi que le jour suivant, Minette Libom Lilikeng présidait le lancement de la plateforme d’agrégation des communications électroniques notamment en ce qui concerne la mise en œuvre d’une passerelle unifiée à travers le code USSD #237#, pour garantir une concurrence saine dans ce domaine.


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