Les tensions à la fois sociales et politiques se multiplient et gagnent du terrain. Elles atteignent des sphères insoupçonnées de la gouvernance actuelle et continuent de creuser les sillons de la division. Nul besoin d’avoir un microscope pour se rendre compte de ce que le pays est traversé par des discours emprunts de violence et de haine. On n’est pas très loin de l’implosion au regard des multiples appels à la paix et au dialogue mobilisés à la fois par la classe politique actuelle, les acteurs de la société civile et les garants de la vie spirituelle de la Nation Camerounaise, en vue d’apaiser le climat politique, social et sécuritaire de plus en délétère. En effet, on a encore en mémoire la réaction des évêques au cours de la 45ème Assemblée générale des prélats. Dans son allocution, Mr Abraham Kome s’est inquiété de la (re)montée du tribalisme au Cameroun. « Il est tant d’arrêter les compétitions qui nous isolent les uns des autres pour entrer dans une coopération où chacun apporte en toute responsabilité ce qui est nécessaire à l’ensemble », a dit le président de la conférence épiscopale nationale du Cameroun (Cenc). Il a par ailleurs préconisé une « réponse pragmatique ». L’homme de Dieu n’a pas manqué de rappeler le carnage de Kumba au cours duquel « les vies de nos enfants ont été volées », ces « personnes innocentes et sans défense », a-t-il ajouté. Cela trahit en outre le fait qu’on a atteint « un des degrés élevés de la perversion humaine », dixit Mgr Abraham Komé. Le président de la conférence épiscopale avait déjà, dans une première lettre, fustigé ces hommes politiques qui utilisent leur pouvoir pour fertiliser le champ du tribalisme, de la violation des libertés et des divisions. Divisions Le pays tend apparemment vers la division si l’on en croit les signaux évoqués par l’église catholique au Cameroun. Il ouvre en outre une brèche à l’exclusion et même à la marginalisation de certaines couches. Sur le plan politique, on peut évoquer la descente sur le terrain des membres de la commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (Cnpbm). Ils ont conduit une série d’activités dans les régions septentrionales du pays du 02 au 04 novembre dernier en vue de promouvoir les deux langues officielles que sont l’anglais et le français. Dans le communiqué final, la commission « a dénoncé la prolifération des discours haineux ». En effet, les discours haineux font rage, notamment sur les réseaux sociaux. Sur le plan sécuritaire, le pays à fort affaire. L’explosion d’une bombe artisanale à Douala au quartier Bonabéri, lieu du Rail, le 19 novembre 2020, rappelle celles de Yaoundé aux quartiers Nsam le 02 novembre dernier ; celle de juillet et de juin. Dans le cadre de la résolution de la crise anglophone, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest (NoSo) sont le champ de tueries (Mother Fran-cisca International Bilingual Academy Fiango in Kumba, etc.) ou d’enlèvements (le cas du cardinal Christian Tumi). Plus le temps passe, plus c’est la pourriture socio-politique qui a pignon sur rue. Le 24 novembre dernier, c’est l’extrait d’une interview du président français au magazine Jeune Afrique qui a défrayé la chronique. Emmanuel Macron a appelé le président Paul Biya « à pacifier son pays ». Il est, pour la circonstance, revenu sur les victimes de la secte islamiste Boko Haram dans la partie septentrionale du Cameroun. Pendant ce temps, le gouvernement rassure. Libertés publiques torpillées Les libertés publiques sont menacées. Le cas « Kamto » désormais interdit de protestation puisqu’il est embastillé chez lui, est connu de tous. La communauté internationale elle-même semble dépassée par la situation de l’opposant Camerounais. C’est une conséquence de l’annonce de la manifestation pacifique du 22 septembre 2020. Depuis lors, le leader politique du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) est retenu prisonnier dans son domicile. Les femmes de son parti politique qui ont essayé de lui apporter à manger, ont été refoulées. En guise de contestation, certaines femmes se sont mises nues. 22 parmi elles ont été interpellées avant d’être relaxées le 21 novembre dernier. D’autres cas de violations des droits humains ont été répertoriés jusqu’ici et pour lesquels leur respect est exigé. Les organisations de la société civile dénoncent, pour la plupart, la rupture illégale de la chaîne de la justice. Sont ainsi présentés autant de faits qui ont été soumis à l’attention des experts afin de répondre aux questions suivantes : Comment en est-on arrivé là ? A qui profitent en réalité ces profondes divisions ? Comment faire pour ramener la vraie unité nationale ? Peut-on espérer un vivre-ensemble réel ?
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