L'administration biden renforce-t-elle la protection des exilés séparatistes aux états-unis ?

Lire l’éditorial d’Eric Boniface Tchouakeu. La version audio de cet éditorial politique du lundi 18 avril 2022 a été diffusée sur les antennes de la Radio Tiémeni Siantou 90.5 FM à Yaoundé et Bafang. Le 15 avril 2022, le Secrétaire à la Sécurité intérieure des Etats-Unis d’Amérique, Alejandro Mayorkas, équivalent au Cameroun de Ministre de l’Administration territoriale, a annoncé que son pays avait décidé d’accorder une protection temporaire de 18 mois à des Camerounais, demandeurs d’asile. La mesure ne concerne cependant que des personnes qui se retrouvent déjà sur le sol américain à la date du 14 avril 2022. Les Etats-Unis ont pris cette décision en raison de la persistance des « violences extrêmes » occasionnées par des forces de défense et de sécurité camerounaises et des groupes armés sécessionnistes dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où le gouvernement camerounais fait face à une insurrection séparatiste depuis quatre ans, soit un an après l’éclatement au grand jour de la crise anglophone d’une part ; ainsi que des violences perpétrées par des combattants de la secte terroriste d’origine nigériane, Boko Haram, dans la région de l’Extrême-Nord. Globalement pour les Américains, ces situations créent dans ces régions ,une instabilité économique ,une insécurité alimentaire , au delà des pertes en vies humaines, des destructions des biens publics et privés ,des difficultés pour des populations d’avoir accès à l’éducation et aux hôpitaux en plus des déplacements d’un bon nombre vers d’autres lieux considérés comme plus sûrs. Il convient cependant de relever que la position de l’Administration Biden sur le sort des Camerounais vivant en situation irrégulière aux Etats-Unis était très attendue, car leur avenir là bas faisait l’objet de joutes politiques au Cameroun. Un revers pour le pouvoir Camerounais ? Le 22 février 2021, des députés Camerounais, essentiellement de la majorité, avaient signé une pétition adressée au Président Américain Joe Biden relativement au rapatriement des Camerounais vivant en situation irrégulière aux Etats-Unis, en lien ou non avec la crise anglophone. Cette déclaration était déjà une réponse à une autre pétition du Congrès des Etats-Unis adressée le 17 février 2021 par une quarantaine de membres du parlement américain à la nouvelle Administration Biden. Des élus du Congrès demandaient dans leur pétition au Président des Etats-Unis et à son Secrétaire du Département à la Sécurité Intérieure, l’équivalent au Cameroun de Ministre de l’Administration territoriale, de « suspendre le rapatriement des Camerounais des Etats-Unis vers le Cameroun parce que les conditions au Cameroun continuent de s’aggraver alors que la violence continue et que la pandémie continue de faire des ravages sur la santé publique et l’économie. » En réponse, des députés Camerounais ont exhorté leurs homologues, « à faire en sorte que leur pays ne soit pas un refuge pour les auteurs de crimes et les financiers d’actes extrêmes. » Le 11 avril 2021 ensuite, une nouvelle lettre ouverte des députés Camerounais, toujours de la majorité pour la plupart, adressée au Secrétaire d’Etat, le Ministre des Affaires étrangères Américain avait été mise, sur les réseaux sociaux. Le document de 05 pages était dans le fond, une réponse à la lettre ouverte du 06 avril 2021 ,envoyée à Anthony Blinken par un collectif d’organisations essentiellement de la société civile, y compris des institutions religieuses, basées aux Etats-Unis d’Amérique et qui portait sur la crise anglophone. Dans leur courrier, les 11 organisations signataires, après avoir fait état d’une situation désespérée et préoccupante dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, affirmaient « croire fermement » que l’Administration Biden peut déployer des efforts pour mettre un terme au conflit qui secoue cette partie du Cameroun depuis octobre 2016. Concrètement, elles demandaient au Secrétaire d’Etat américain notamment : de nommer un Envoyé Spécial qui sera chargé de la résolution de la crise ;d’utiliser l’influence des Etats-Unis pour pousser les protagonistes du conflit sur la table des négociations ;d’initier la conclusion d’un cessez-le-feu immédiat entre les parties afin de faciliter le travail des humanitaires sur le terrain ; de réclamer une enquête internationale des Nations Unies sur les allégations de massacres, atrocités et autres graves violations des droits de l’homme en lien avec le conflit, afin qu’il n’ y ait aucune impunité pour leurs auteurs ;ou encore de mettre fin à la vente des armes ou de fournir toute assistance militaire au gouvernement camerounais, lesquels ont permis selon ces organisations, à l’armée régulière de commettre des atrocités sur des populations civiles. Pour leur part, des députés Camerounais ont réfuté « les inexactitudes et contre-vérités » contenues dans la lettre ouverte des ONG et énuméré la plupart des initiatives prises par le gouvernement camerounais pour résoudre la crise comme, l’organisation d’un Grand Dialogue National en 2019,puis l’adoption la même année du code général des collectivités territoriales décentralisées qui a permis l’organisation des premières élections régionales en 2020,et l’implémentation d’un statut spécial accordé aux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. « Toutefois, nous continuons à solliciter l’appui et la collaboration des pays amis, afin d’enrayer les activités de certains membres de la diaspora camerounaise qui cherchent à déstabiliser notre système politique à travers la désinformation », avaient encore écrit des députés Camerounais dans leur courrier. Le gouvernement américain a donc dû analyser les contenus de toutes les sollicitations qui lui sont parvenues pour prendre sa décision d’accorder une protection temporaire de 18 mois aux Camerounais, demandeurs d’asile et illégalement installé sur son sol. Avantage aux sécessionnistes ? Même si l’Administration Biden a également fait état de la situation sécuritaire dans la région de l’Extrême-Nord pour justifier sa décision, il est évident que c’est la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qui a le plus fait pencher la balance. Car c’est ce sont les Etats-Unis qui abritent le plus grand nombre des activistes de la diaspora accusé par le gouvernement camerounais d’entretenir la crise dans les régions anglophones La dernière décision du gouvernement américain démontre aussi que le pays de l’Oncle Sam a un rôle majeur à jouer dans la résolution du conflit dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. S’agissant des joutes politiques internes au Cameroun, la décision du gouvernement américain d’accorder une protection temporaire de 18 mois à des Camerounais, demandeurs d’asile sur son sol, est évidemment saluée par les uns et désapprouvée par les autres. Mais cela a peu de chance d’avoir une grande influence directe sur la situation actuelle du conflit dans les régions anglophones, du moins dans le court terme


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