Au-delà de l’optimisme des pouvoirs publics, le climat dans ces deux régions reste dominé par des violences atroces. Ce qui compromet la mise en œuvre du Plan présidentiel de reconstruction. Beaucoup – et selon toute logique – suggèrent au gouvernement de n’élaborer et mettre en œuvre un plan de reconstruction ou de rétablissement des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qu’après le retour effectif de la paix. Mais alors que la guerre s’enlise avec des conséquences humaines et économiques effroyables, cette approche semble ne plus accrocher du tout le président de la République qui, par ailleurs, est convaincu d’être allé au-delà ce que l’on pouvait espérer en termes de concessions sans que, de leur côté, les sécessionnistes fassent le moindre effort de paix. En mettant sur pied le Plan présidentiel pour la reconstruction et le développement du Nord-Ouest et du Sud-Ouest (Pprd), courant avril dernier, Paul Biya a cru que celui-ci, parce qu’éventuellement soutenu par la majorité de la population laminée par près de quatre années de guerre et qui a hâte de voir la vie reprendre son cours normal. Il y a quelques jours, le coordonnateur national dudit plan, Paul Tasong, qui est par ailleurs ministre délégué auprès du ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), a achevé une mission de présentation et d’explication du Pprd aux habitants des deux régions en crise. Il a été bien accueilli sur le terrain par les autorités administratives, municipales, traditionnelles et associatives, et qui ont juré contribuer à la réussite de cette mission périlleuse. La première phase du plan de reconstruction, financée à hauteur de 90 milliards F est structurée autour de trois piliers fondamentaux : la promotion de la cohésion sociale, la réhabilitation des infrastructures sociales de base et la revitalisation de l’économie locale. Dans le détail, l’équipe Tasong devra réhabiliter 350 écoles, 115 centres de santé, 40 ponts, 400 points d’eau, 500 kilomètres de lignes électriques basse tension, 45 marchés, 12 000 maisons. Elle devra, en outre, reprofiler 600 kilomètres de routes rurales et restaurer pas moins de 25 000 hectares de plantations. Le coordonnateur est convaincu, en tout cas, que ce plan charrie de nombreuses attentes. «Espoir d’avoir à nouveau une maison, espoir de reprendre la construction des routes, espoir d’un approvisionnement en eau potable et en électricité sans interruption, espoir de pouvoir renvoyer les enfants à l’école et avoir accès aux soins de santé, espoir enfin pour la relance de l’activité économique», s’exprime en tout optimisme Paul Tasong. Ring Road Les sceptiques pour qui un tel chantier en contexte de guerre aurait dû être confié au Génie militaire qui a à la fois l’ingénierie et les moyens de riposter à d’éventuelles attaques pendant la réalisation des travaux, attendent de voir comment le Plan présidentiel pour la reconstruction et le développement du Nord-Ouest et du Sud-Ouest va se déployer. D’ores-et-déjà, la coordination du programme assure qu’il ne s’agit pas d’une mission impossible. Elle prévoit que la reconstruction se fasse progressivement, des zones pacifiées et sécurisées aux zones instables, «car, il n’est pas question de mettre en péril la vie des bénéficiaires et des travailleurs ou de risquer de voir à nouveau détruite l’infrastructure à reconstruire». Il faut relever que dans ce contexte sécuritaire défavorable, le Pprd sera réalisé concomitamment avec les travaux de la «Ring Road» du Nord-Ouest, inscrits dans phase III du Programme d’appui au secteur des transports. Avec le nouveau financement d’un montant de 106 milliards F obtenus il y a quelques mois auprès de la Banque africaine de développement (Bad) par le gouvernement, ce projet devrait reprendre bientôt sur 280 kilomètres de route correspondant aux sections Kumbo-Nkambe-Misaje. Dans la deuxième phase du Pprd, il sera question pour le gouvernement de remettre à flot les sociétés industrielles localisées dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, à l’instar de la Cameroon Development’ Corporation (Cdc) ou de Pamol Plantations, dont les pertes économiques ont été chiffrées par le Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam) à plus de 800 milliards F entre 2017 et 2018. A Bamenda par exemple, le coordonnateur du Plan présidentiel de reconstruction du Noso a fait la promesse au maire de la ville, Paul Achobong Tambeng, de ce que les activités reprendront normalement dans la ville. En effet, le magistrat municipal a exprimé son désir ardent de voir les activités économiques reprendre vie dans le Nord-ouest. « Il y a de l’espoir, l’espoir de voir les élèves reprendre le chemin de l’école dans les localités aujourd’hui sinistrées. L’espoir de voir les véhicules circuler sur les routes bien construites, l’espoir aussi de voir renaître les activités économiques telles que l’agriculture », rassure Paul Tasong. Un optimisme qui conforte l’élite locale et les bénéficiaires de ce Plan de reconstruction. Signalons que cette première étape du processus qui s’est achevé le 5 juillet 2020, était consacrée à une vaste campagne de sensibilisation et de vulgarisation.
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