DISCOURS DE S.E.M. PAUL BIYA, A l’occasion de la prestation de serment.

Yaoundé, le 06 novembre 2018 Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, Monsieur le Premier Vice-Président du Sénat, Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel, Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Mesdames et Messieurs les Députés, Mesdames, Messieurs, Chers compatriotes, Qu’il me soit tout d’abord permis de remercier Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale pour ses paroles de bienvenue et ses encouragements au début de ce nouveau mandat. Je tiens à exprimer une fois encore devant vous ma reconnaissance au peuple camerounais de m’avoir renouvelé sa confiance. Celle-ci sera pour moi un soutien indispensable dans l’exercice des hautes responsabilités que j’aurai à assumer au cours des prochaines années. Le serment que je viens de prêter « devant le peuple », selon les termes de l’article 7 de notre Constitution, en présence de ses représentants, revêt une haute valeur symbolique à un double titre : - il implique une fidélité absolue aux institutions de la République, à laquelle je ne saurais déroger ; - il a d’autre part valeur d’engagement personnel irrévocable à se conformer aux obligations qui sont celles du Chef de l’Etat, telles qu’elles sont définies par notre loi fondamentale. Comme par le passé, ce sont ces principes qui guideront mon action au service du peuple camerounais au cours du septennat des « Grandes Opportunités » qui s’ouvre aujourd’hui. Mesdames, Messieurs, Avant d’en évoquer les perspectives, je souhaiterais que nous jetions ensemble un rapide regard en arrière, ce qui nous permettra de faire le point sur la situation présente. Le septennat qui vient de s’achever ne s’est pas écoulé comme un « long fleuve tranquille ». Au plan de la sécurité, nous avons d’abord été confrontés aux attaques répétées du groupe terroriste Boko Haram, qui a semé la terreur et la désolation dans l’extrême-nord de notre pays. Nous avons fait face, de concert avec nos voisins et avec l’aide de nos partenaires traditionnels. Nos forces de défense et de sécurité, auxquelles je tiens ici à rendre, à nouveau, hommage, ont repoussé l’ennemi hors de nos frontières. Aujourd’hui, la situation est stabilisée mais nous restons vigilants et déterminés. Par la suite, dans nos régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, des forces négatives ont cru pouvoir profiter de revendications d’ordre corporatiste pour essayer de mettre en œuvre un projet de sécession. Il s’en est suivi une succession d’actes de violence terroriste auxquels le gouvernement a répondu en prenant des mesures nécessaires pour préserver l’ordre public, ainsi que la sécurité des citoyens et de leurs biens. Il va sans dire que l’objectif des sécessionnistes porte atteinte à notre Constitution, qui consacre le caractère « indivisible » de notre République. En revanche, le désir maintes fois exprimé, de nos populations d’être mieux associées à la gestion de leurs affaires locales, nous a conduits à prendre des mesures nécessaires pour accélérer le processus de décentralisation. Ces tâches prioritaires ne nous ont pas détournés de la nécessité d’œuvrer à l’amélioration de notre économie, affectée par les effets de la crise économique et financière mondiale, ainsi que par la baisse des cours des matières premières. Dans ce but, nous avons poursuivi la mise en œuvre de nos réformes structurelles et pris des mesures pour redresser notre situation budgétaire. Notre « résilience » a été saluée par le FMI avec lequel nous avons conclu, en 2017, un programme économique et financier appuyé sur une « facilité élargie de crédit ». Nos efforts expliquent sans aucun doute le retour progressif de notre croissance. Parallèlement, tout en veillant à la soutenabilité de notre dette extérieure, nous avons donné une nouvelle impulsion à nos grands projets d’infrastructures concernant la production d’énergie, la distribution d’eau potable et la construction des routes. De nombreuses réalisations en portent témoignage. Malgré les difficultés de la conjoncture, de nombreux chantiers ont été ouverts dans les domaines de la santé, de l’éducation et des services sociaux. Il est indéniable que sur ce plan, des avancées notables ont été réalisées. Nous avons, par ailleurs, continué le parachèvement de notre édifice institutionnel et démocratique, avec la mise en place effective du Sénat et du Conseil Constitutionnel. Ainsi, contre vents et marées, nous avons maintenu notre cap vers l’émergence. Ce rapide bilan, qui est loin d’être exhaustif, montre bien que notre pays est en pleine transformation et qu’il avance résolument dans la voie du progrès. Mesdames, Messieurs, D’une façon générale, au cours du septennat qui s’annonce, nous veillerons à consolider nos acquis, tout en explorant les pistes nouvelles, nous permettant de saisir toutes les opportunités d’un monde en constante évolution. Dans cet esprit, il va de soi que nous allons poursuivre nos réformes structurelles afin de renforcer notre équilibre budgétaire et de conforter la soutenabilité de notre dette. Des finances saines sont en effet la condition de l’attractivité d’une économie et, donc, de son aptitude à accueillir les investissements. A ce propos, je voudrais appeler votre attention sur les changements qui sont en cours au niveau international et qui ne manqueront pas d’avoir des répercussions sur notre pays. Les règles qui régissaient la mondialisation des échanges depuis plusieurs décennies sont remises en cause. Les tendances au protectionnisme, voire à l’isolationnisme gagnent du terrain. Il y a là le risque clair d’un effet déstabilisateur pour de nombreux pays, en particulier pour ceux en développement comme le nôtre. Nous allons de plus en plus subir les effets des changements climatiques qui impacteront la vie de nos concitoyens, notamment ceux du monde rural. Dans ce contexte, il me semble opportun de nous attacher à développer les secteurs de notre économie qui pourront réduire sensiblement nos importations de biens et services. Cette politique présentera l’avantage de nous permettre de rééquilibrer notre balance commerciale chroniquement déficitaire. Par ailleurs, nous allons réaliser une véritable « révolution agricole » en modernisant nos moyens de production et en transformant davantage nos produits agricoles. Cela devrait aller de pair avec la mise à disposition de nouveaux équipements, magasins de stockage et routes d’accès. Ainsi pourrait se conforter notre statut de grenier de l’Afrique Centrale. Une économie moderne ne saurait se concevoir sans l’existence d’un secteur industriel performant. Nous disposons d’un Plan Directeur d’Industrialisation qui définit les contours et le contenu d’un projet d’envergure dans ce domaine. Sa réalisation sera une des tâches prioritaires du septennat. L’industrie, comme l’agriculture, exigent un apport d’énergie stable et suffisant. Nous avons entrepris des efforts importants dans ce secteur depuis un certain temps déjà. Les barrages et les centrales hydroélectriques que nous avons construits devraient nous permettre, à plus ou moins brève échéance, de répondre pleinement aux exigences de notre économie et aux préoccupations de nos populations en la matière. Mais nous ne nous arrêterons pas là. Nous continuerons d’exploiter tous les sites et cours d’eau disponibles afin de faire du Cameroun un grand producteur d’électricité dans notre continent. Nous ne délaisserons pas pour autant les zones rurales en les dotant progressivement de centrales solaires. De la même façon, nous continuerons à développer nos infrastructures de transport (routes, ports, aéroports) au bénéfice de notre économie, mais aussi pour faciliter les communications avec nos voisins. D’autre part, conscients que la finalité de la démocratie est d’apporter au plus grand nombre des conditions de vie aussi bonnes que possible et une véritable égalité des chances, je persisterai à consacrer tous mes efforts : - à favoriser la relance de la croissance économique, créatrice d’emplois, notamment pour les jeunes, et susceptible d’améliorer le pouvoir d’achat ; - à promouvoir le rôle des femmes dans notre société ; - à faciliter l’intégration sociale des jeunes en développant encore davantage notre système éducatif, à tous les niveaux, et en mettant l’accent sur la professionnalisation ; - à lutter contre l’exclusion, notamment par une meilleure protection des personnes vivant avec un handicap ; - à améliorer l’accès aux services publics de l’eau potable et de l’électricité ; - à renforcer notre système de santé, en ouvrant de nouveaux hôpitaux et en finalisant un dispositif de sécurité sociale efficace ; - à mettre en valeur une politique d’habitat social digne de ce nom ; - à valoriser notre patrimoine culturel ; - et enfin à apporter au secteur sportif le soutien qu’il mérite, pour que les efforts que nous avons consentis pour accueillir la CAN 2019 reçoivent leur juste récompense. Mesdames, Messieurs, Les grands défis que nécessite l’accès à l’émergence de notre économie, que j’ai rappelés, et les engagements que j’ai pris pour améliorer la qualité de la vie des Camerounais, supposent en premier lieu que des conditions adéquates de stabilité et de sécurité soient réunies. Je puis vous donner l’assurance que je ferai en sorte que ce soit le cas. L’objectif de l’émergence doit être érigé en grande cause nationale qui mobilise l’ensemble de nos concitoyens afin de faire du Cameroun un pays moderne et socialement avancé. Les agents du service public, comme du secteur privé, ont à cet égard un rôle important à jouer. Je connais leurs difficultés. Je prendrai les mesures nécessaires à l’amélioration de leurs conditions de travail afin de leur permettre de mieux participer au progrès de notre pays. Avant de conclure, je veux souligner que je me suis attentivement penché sur les frustrations et les aspirations de la grande majorité de nos compatriotes du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Un bon nombre de réponses à ces préoccupations et à ces aspirations sera apporté dans le cadre de l’accélération du processus de décentralisation en cours. Dans les meilleurs délais possibles, des mesures seront prises pour élargir le champ de compétences des collectivités territoriales afin de leur donner les moyens d’une plus grande autonomie. Quant à la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme, elle continuera à être mise en œuvre par la commission qui y est dédiée. Ces actions et d’autres seront prises pour régler nombre de problèmes qui sont à l’origine des frustrations et des insatisfactions qui se sont manifestées ces derniers temps. Nous espérons que cela permettra de rétablir le calme indispensable au retour à des activités économiques et sociales normales. J’ai l’intime conviction que l’écrasante majorité de nos compatriotes des deux régions concernées aspirent à retrouver rapidement la paix au sein de la communauté nationale. Malheureusement, nombre d’entre eux, en raison de la menace que les sécessionnistes continuent de faire peser sur cette partie de notre pays, n’ont pu exercer leur droit de vote à la récente élection présidentielle et, donc, exprimer leur attachement à notre unité nationale. Je leur demande de ne pas perdre espoir et d’accorder tout le soutien possible à l’action des autorités en vue du rétablissement de la paix. Ils savent mieux que personne ce que serait leur existence sous le joug d’extrémistes qui font régner la terreur et la désolation dans leurs régions depuis quelques mois. A ces entrepreneurs de guerre, qui mettent à mal notre unité nationale et prônent la sécession, il faut qu’ils sachent qu’ils se heurteront non seulement à la rigueur de la loi, mais aussi à la détermination de nos forces de défense et de sécurité. Je leur lance un appel à déposer les armes et à retrouver le droit chemin. J’en appelle tout particulièrement aux jeunes qui se sont laissé entraîner dans une aventure sans lendemain. Il ne fait l’ombre d’aucun doute que le destin de nos compatriotes du Nord-Ouest et du Sud-Ouest s’inscrit dans le cadre de notre République. Fort du soutien du peuple camerounais tout entier et persuadé qu’il existe une issue honorable, dans l’intérêt de tous, je ferai en sorte que le calme et la sérénité reviennent dans les deux régions concernées, dans le respect des institutions dont je suis le garant. M’adressant maintenant à mes jeunes compatriotes, je voudrais vous dire de ne pas perdre espoir, j’ai compris votre aspiration profonde à des changements qui vous ouvrent les portes de l’avenir et permettent votre plein épanouissement. J’ai tout aussi compris votre désir de mieux participer à la prise des décisions qui engagent l’avenir de notre pays. J’en tiendrai compte en ayant à l’esprit que le Cameroun de demain se fera avec vous. En étant uni, notre pays, fier de ses avancées démocratiques, économiques et sociales, s’engagera avec confiance dans le progrès et la modernité. C’est pourquoi je demande, ici et maintenant, au peuple camerounais dont je connais le patriotisme, de m’aider à continuer dans la paix l’œuvre de construction nationale. Vive la République ! Vive le Cameroun !


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