Exit la can et retour aux réalités sociopolitiques

Lire ici l’éditorial politique de Eric Boniface Tchouakeu, journaliste et chef de chaîne de Radio Tiémeni Siantou (90.5 FM à Yaoundé et Bafang). Les lampions se sont éteints le 06 février 2022 au stade d’Olembé à Yaoundé sur la 33ème édition de la Coupe d’Afrique des Nations de football (CAN). Dans une rencontre longtemps indécise, les Lions de la Téranga du Sénégal ont été couronnés pour la première fois dans la compétition, après leur victoire sur les Pharaons d’Egypte à l’issue de la séance des tirs aux buts 04 à 02. Pour sa part, le Cameroun pays hôte, termine à la 03ème place synonyme de médaille de bronze, après une belle remontée face au Burkina Faso le 05 février 2022 au stade Ahmadou Ahidjo à Yaoundé. Les Lions menés 03 buts à 0 jusqu’à la moitié de la seconde mi-temps par les Etalons, ont réussi à revenir à la marque et remporter la séance des tirs aux buts qui s’en est suivie en transformant tous leurs 05 penalties contre 03 pour leurs adversaires. Mais cette « remontada » est largement insuffisante pour calmer ou adoucir l’insatisfaction de nombreux supporters, toujours en colère à cause de la contre-performance de leur équipe nationale. D’un point de vue sportif en effet, le Cameroun, quintuple vainqueur de la CAN et 02ème pays le plus titré dans la compétition derrière l’Egypte, sept (07) trophées, ne peut plus se contenter d’une médaille de bronze, qui plus est, dans un tournoi qui se déroule à domicile. L’échec sportif de l’équipe nationale de football qui, on l’a encore vu pendant toute la durée de la CAN, fédère les Camerounais indépendamment de leurs appartenances ethniques et religieuses et même de leurs opinions politiques, fera indubitablement rejaillir au plus vite à la surface, des problèmes notamment politiques et sociaux aux quels le pays est confronté. Il y a en premier lieu en lien direct avec l’organisation de la CAN au Cameroun, des problèmes de gouvernance. Ils sont nombreux au sein de l’opinion à réclamer des comptes relativement à la conduite des différents chantiers dédiés à cet événement. La compétition aurait dû avoir lieu au Cameroun en 2019, mais la Confédération Africaine de Football (CAF) avait finalement opté pour un glissement de date du fait des retards dans la livraison de certains ouvrages. Par ailleurs ; en dépit des fortes sommes d’argent déjà englouties, on a pu observer que le complexe sportif d’Olembé qui devrait à terme être baptisé au nom de l’actuel Chef de l’Etat Paul Biya, est encore en attente d’achèvement, bien que son stade de 60.000 places soit l’un des plus imposant en Afrique. Cependant, la pelouse de cette magnifique enceinte, ainsi que celle du stade de Japoma à Douala, 50.000 places, n’étaient pas au beau fixe. Ces quelques faits et bien d’autres font croire à une bonne partie de Camerounais qu’il y a eu des détournements massifs de deniers publics dans la conduite du processus d’investissements publics liés à l’organisation de la dernière CAN ; certains parlent même de « Cangate ». Avant le début de la compétition le 09 janvier 2022, l’attention de l’opinion était focalisée sur des détournements massifs de l’argent public dans le cadre de la gestion des fonds alloués à la lutte contre la pandémie du Covid 19 et ses répercussions socio-économiques ; la crise sociopolitique et sécuritaire dans les deux régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en cours depuis fin 2016 ; ou encore la situation des prisonniers d’opinion. Après la relative pause observée durant la CAN sur ces dossiers, il est quasi certain que ces réalités vont revenir au devant de la scène dans les prochains jours, en plus de celles avec lesquelles les Camerounais se sont déjà accommodés depuis très longtemps comme la vie chère, la baisse continue du pouvoir d’achat du plus grand nombre, les problèmes de la disponibilité de l’eau potable et de l’énergie électrique, le chômage massif des jeunes et le sous-emploi etc. Il est évident qu’une éventuelle victoire à la CAN n’allait pas résoudre ces difficultés, mais elle aurait pu donner un peu de répit aux gouvernants.


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