Le TCS inflige 20 ans de prison à deux fonctionnaires du Minfi

Contrôleur principal du trésor de formation, M. Heleo Waïdama était poursuivi en compagnie de son fils pour détournement de fonds publics perpétrés au moyen des machines à timbrer. Il niait les faits et parlait de complot. Mais le tribunal n’a pas été convaincu par ses arguments au contraire de ceux de son enfant, qui a été immédiatement remis en liberté après deux années passées derrière les barreaux.

Les carottes sont cuites pour M. Heleo Waïdama, contrôleur principal du trésor et ancien percepteur des Finances de la localité de Pete dans la région de l’Extrême-Nord. Il devra encore passer près de 18 ans de détention à la prison centrale de Yaoundé Kondengui où il est incarcéré depuis deux ans. Le Tribunal criminel spécial (TCS) l’a reconnu coupable des faits de détournement de deniers publics de la somme de 120,1 millions francs commis à travers des machines à timbrer. Le concerné a été condamné à 20 ans d’emprisonnement ferme et au paiement de 120,3 millions de francs de dommages et intérêts à l’Etat du Cameroun. Il doit aussi verser au trésor public 789 mille francs de frais de procédure en même temps qu’il a été frappé d’une déchéance de ses droits civiques pendant la période de sa condamnation. Le tribunal a aussi prononcé la confiscation de ses avoirs financiers saisis dans ses deux comptes ouverts dans les livres d’Express Union.

L’ancien percepteur a cependant été soulagé par l’acquittement prononcé au bénéfice de son propre fils, le nommé Ibrahim Alim. Poursuivi pour l’infraction de complicité des détournements de fonds publics reprochés à son père et incarcéré avec lui à la prison centrale de Yaoundé Kondengui, M. Alim a été totalement blanchi des faits mis à sa charge. Il a donc été acquitté pour faits non-établis. Le tribunal a ordonné sa libération immédiate. L’étudiant de deuxième année en droit à l’Université de Maroua a poussé un ouf de soulagement devant cette décision de justice qui lui permet de reprendre le chemin de l’école. Ainsi se referme cette affaire qui a failli emporter le père et son fils.

Manquant imputé

Peu avant de prononcer la sentence, le président du collège des juges du TCS a fait un bref rappel des débats faits au cours de cette procédure. Il a indiqué que l’accusé Heleo Waïdama était accusé d’avoir distrait, au moyen de deux machines à timbrer, la somme de 120,1 millions de francs, au cours de la période 2020 à 2021, en faisant recours à son fils à qui il avait remis le mot de passe desdites machines. Selon l’accusation, l’ancien comptable avait reconnu ce déficit décelé par une mission de contrôle effectuée à Pete. Il avait alors promis de vendre ses biens pour combler le manquant qui lui était imputé, mais n’avait pas tenu parole.

Heleo Waïdama avait par la suite nié les faits qui lui étaient reprochés en estimant que ceux-ci relevaient d’un complot ourdi par le Trésorier payeur général de Maroua 1 qui demandait de lui mouiller la barbe. Il avait soutenu que la prétendue mission de contrôle dont le rapport était à la base de ses ennuis judiciaires avait été faite des mois après la passation de service qui n’avait pas constaté tous les griefs faits contre sa personne. Et que la vente des timbres à travers ces machines ravitaillées à concurrence de 10 millions de francs n’atteignait jamais ce montant. D’après lui, il était incongru de l’accuser d’un détournement de 120,1 millions de francs. L’ancien caissier avait contesté les accusations selon lesquelles son fils, étranger au service, détenait son mot de passe et manipulait les machines à problèmes.

Seulement, M. Heleo Waïdama avait été contredit par les témoins de l’accusation qui avaient démontré à travers des listings que les machines à timbrer de Pete avaient été approvisionnées à plusieurs reprises et que l’accusé, aidé par des complices, avait mis en place un mode opératoire consistant à aller vendre les timbres dans certains points populaires de la ville de Maroua, notamment le palais de justice. C’est tenant compte de ces arguments et de bien d’autres éléments de preuve de l’accusation que le collège des juges a estimé que les déclarations de l’ancien percepteur étaient fantaisistes et dénuées de tout fondement.

Perpétuité requise

Après avoir déclaré l’accusé Heleo Waïdama coupable des faits mis à sa charge, le tribunal a donné la parole au représentant du ministère des Finances, constitué partie civile dans ce procès. Ce dernier a réclamé la restitution des fonds détournés et le paiement de 250 mille francs représentant les frais de procédure supportés par le MINFI  en désignant son mandataire. A la suite du représentant du MINFI , le parquet, dans ses réquisitions sur la peine, a demandé au tribunal de condamner l’accusé à la peine d’emprisonnement à vie en s’appuyant sur l’article 184 du Code pénal alinéa 1 (a) qui punit à cette peine tout détournement de fonds publics dont la valeur excède 500 mille francs.

L’avocat de la défense, pour sa part, a plaidé pour que le tribunal accorde des circonstances atténuantes à son client du fait de sa qualité de délinquant primaire en plus de sa bonne tenue devant la barre. Il a également indiqué au collège des juges de tenir compte du fait que M. Heleo Waïdama est un père d’une nombreuse famille. Comme dernières déclarations, l’accusé s’est remis à la sagesse et à la souveraineté du tribunal à l’égard d’un vieux comptable qu’il est. «J’ai fait de mon mieux. Je vous ai toujours dit que cette affaire est une cabale montée contre ma personne sur la base des rancunes. Je suis au seuil de la retraite. Je n’ai jamais reçu une demande d’explication de ma hiérarchie après avoir été chef de nombreux postes comptables», s’est-il défendu.

Dans sa décision finale, le tribunal n’a pas totalement suivi le parquet qui demandait la prison à vie mais a tout de même eu une main lourde en infligeant 20 ans d’emprisonnement ferme à M. Heleo Waïdama consolé par l’acquittement de son fils Ibrahim Alim.


 


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